On trouvera ici, pour l'heure, les textes de Runes-Lettres d'O.D.I.N.
qui, à terme, seront complètés des réflexions du groupe de
travail de l'O.D.I.N.-76, de sa création jusqu'à sa dissolution en 1996.



Histoire (très) abrégée de Normandie

C'est le résultat d'un an d'un travail collectif qui devait nous servir à fixer le plus strict minimum à connaître de l'histoire de la Normandie. Ce document de travail a été établi en 1985.
O.D.I.N.-76

Originale depuis le Xe s., la Normandie n'a pas d'unité géographique, ethnographique, linguistique. La Normandie est d'abord un sentiment d'appartenance issu de la colonisation scandinave et du souvenir d'un État autonome de 911 à 1204.
Aujourd'hui sont considérées comme Normandes les deux régions de programme de "haute" ( M. hbts) et "basse" ( M. hbts) Normandie, ainsi que les îles Jersey, Guernesey et dépendances ( M. hbts).
Viking au IXe s., conquérant du XIe s., depuis réputé riche et chicanier, le tempérament Normand plus sensible aux réalités, aux personnes qu'aux idéologies, marque sa persistance en politique. Attirés par la mer et les espaces lointains les Normands n'en conservent pas moins une forte image agricole.
(E. U. : Musset/Clary)

1. DES CELTES AU NORMANDS.
Jusqu'au milieu du IIe s.: Unelles - Cotentin, Abrincantes - Avranchin, Bajocasses – Bessin, Esuvii - Sagii (Sées), Vidocasses – Vieux (Caen), Lexoves - Lisieux, Eburovices - Evreux, Véliocasses - Rouen, Calettes - Pays de Caux.
1.1 Seconde Lyonnaise et christianisation.
Création pendant le bas-Empire d'un nouveau chef-lieu à Rouen et christianisation suivant l'axe Lyon-Rouen.
IIIs. VIs. attaques saxonnes sur les côtes de la Manche, constitution du Littus saxonnicus et fondation d'établissements côtiers dans le Bessin.
- 316 Rouen est évêché, puis jusqu'au VIe s. création des six évêchés d'Évreux, Lisieux, Bayeux, Coutances, Avranches et Sées.
- fin du Ve s. occupation franque et orientale de la Normandie.
1.2 - 800 premières incursions scandinaves, Charlemagne réorganise les défenses côtières qui ne seront efficaces qu’une fois, en 820.
- 841 Rouen est incendiée, les abbayes sont rançonnées.
- 851 premier hivernage de scandinaves sur une île de la Seine.
- 862 Charles le Chauve établit un pont fortifié à Pîtres sur la Seine et charge les bretons de la défense du Cotentin et de l'Avranchin en 867.
1.3 Fondation de la Duché de Normandie
- 911 Hrôlfr "Ganger" reçoit à Saint Clair Sur Epte les évêchés de Rouen et Évreux tandis que d'autres armées, iro-norvégiennes, s'établissent dans le Cotentin et le Bessin.
- 923 et 933 les Ducs de Normandie rétablissent les limites de la seconde lyonnaise.
L'apport scandinave est encore remarquable par la toponymie, le vocabulaire marin, l'esprit d'entreprise et la capacité d'adaptation. Mais la véritable chance de la Normandie réside dans la personnalité de ces Ducs qui ont suscité et entretenu un renouveau monastique. La disparition du servage, les créations de villes : Dieppe, Argentan, Falaise, Alençon, Saint-Lô, Valognes et Caen, l'établissement de la Paix du Duc, la relative uniformité des institutions, l'interdiction de châtellenies autonomes et la réorganisation de l'armée sur la base du fief de chevalier, font du XIe s. le plus brillant de l'histoire de Normandie.


2. L’ÉTAT ANGLO-NORMAND
2.1 La conquête d'Angleterre
- 1035 Robert le magnifique à Nicée, son fils Guillaume après une minorité difficile reconstruit l'État Normand.
- 1063 maître du Maine
- 1066 désigné, en janvier, héritier d'Édouard le Confesseur, il est couronné Roi d'Angleterre le 25 décembre, après avoir vaincu Harold à Hastings le 14 octobre. A l'origine de sa réussite : une flotte remarquable, la meilleure cavalerie lourde d'Europe, sa science des fortifications.
2.2 L'État Anglo-normand
Jusqu'en 1204 la Normandie et l'Angleterre forment une communauté morale et politique. C'est une période faste et bénéfique pour la Duché, due aux possessions d'outre-manche, les ports se développent, mais aussi de renaissance intellectuelle - Lanfranc et le Bec-Hellouin qui se traduit par l'essor de l'architecture religieuse.
2.3 Art roman, "Art Normand".
C'est au milieu du XIe s. que s'affirme un style proprement Normand de composition de masses. Avant 1066 : Bernay, Jumièges, nef du Mont Saint-Michel, après 1066 : Abbaye aux Hommes, aux Dames (Caen), Cerisy-la-Forêt, Lessay (diffusion de la voûte sur croisée d'ogives).
2.4 Une administration efficace et centralisée.
Henri Beauclerc (1106-1135), politique de talent, consolide les frontières sud : Arques, Gisors, Château sur Epte, Domfront, Chambois, Falaise, Caen, Brionne. Justice et finances sont contrôlées par l'Échiquier présidé par le Duc.
2.5 Les Plantagenêts XII-XIIIe s.
La Normandie est la clef de voûte de l’Empire Plantagenêt (de Berwick à Bayonne). C'est de cette époque que date la rédaction de la Coutume de Normandie, considérée jusqu'au 4 août 1789 comme le fondement de l'unité morale de la Duché et qui est encore active dans les îles Normandes.
- 1203-1204 Philippe Auguste, roi des Francs, effectue le rattachement de la Normandie, sauf les îles, à la couronne française et exige l'abandon des possessions d'outre-mer des barons fieffés en Normandie.


3 PROVINCE DU ROYAUME CAPÉTIEN
3.1 Si les institutions sont intégralement maintenues, tous les postes de direction : baillis, évêques sont tenus par des horzains jusqu'à la fin du règne de Louis IX ; seuls les monastères conservent la jouissance de leurs biens anglais jusqu'au XVe s. La rupture anglo-normande est consommée en 1258.
3.2 Le temps de la prospérité XIII-XIVe s.
Les campagnes se repeuplent et l'agriculture reprend ses progrès : extension des défrichements, généralisation des moulins, du pommier à cidre et du sarazin, extension des salines, marché actif des rentes foncières. Croissance des villes, Rouen, Dieppe, Honfleur se lancent dans le grand commerce maritime, élargissement du commerce local : foires des Guibray à Falaise, Montmartin en Cotentin. Rouen, Caen, Louviers, Montivilliers et Saint-Lô sont des centres drapiers réputés jusqu'en Italie.
François Ier fonde Le Hâvre en 1517.
- XVIe s. c'est l'affirmation des commerçants et officiers royaux qui font construire des hôtels en ville et leurs manoirs à la campagne.
3.3 Réforme, Contre-réforme, misère populaire (1550-85) C'est aux environs de 1550 que la moyenne noblesse et la bourgeoisie de Caen et de Rouen passent au calvinisme. Vingt ans de guerres civiles réduisent le pouvoir des Réformés à quelques bastions autour de Caen et de Dieppe. Les îles restent calvinistes marquant le début du schisme moral avec la Normandie continentale.
- XVIIe s. les famines, épidémies et la pression fiscale provoquent l'insurrection des Nus-Pieds (1639) réprimée par Richelieu.
Parallèlement la Contre Réforme se manifeste par la création de couvents féminins, des campagnes de prédications - Saint Jean Eudes - et l'envoi de missions au Canada.
La révocation de l'Édit de Nantes et l'attitude de l'administration porte un coup sévère à l'économie en encourageant les Réformés à l'exil vers l'Angleterre ou la Hollande.
- Le XVIIIe s. voit l'essor des ports, la construction de routes royales, le développement des industries textiles, métallurgiques, mais aussi la multiplication d'activités de complément dans les campagnes.
- 1789 la Normandie demande de l'ordre dans les finances et la liberté économique, le respect de la Charte aux Normands. La révolution ne répond pas à ces souhaits.


4. UN PAYS CONSERVATEUR
4.1 Hormis l'insurrection Fédéraliste dans le Calvados et l'Eure les Normands montrent peu de zèle à participer aux grands épisodes de la révolution. Le geste de Charlotte Corday témoigne plutôt du sentiment d'exaspération des Normands contre les extrémismes.
4.2 Utilitarisme et goût du "juste milieu".
Seul mouvement qui puisse revendiquer une adhésion populaire, la chouannerie, dans les bocages, est une réaction aux assignats, aux réformes et à la conscription. Les Biens Nationaux trouvent acquéreurs. Divisée en cinq départements, sauf l'Orne qui reprend la moitié du Perche, la Normandie est respectée dans ses limites. Mais l'ancienne Duché perd toute originalité institutionnelle, toute organisation commune. Elle trouve néanmoins son compte dans presque tous les régimes d'ordre.
Les hommes politiquez ont en majorité trouvé leur voie dans le "juste milieu" avec une nuance de respect pour la réussite économique. Seuls quelques pays de l'Eure et de la Seine-Inférieure croient aux promesses du radicalisme. Pourtant la Normandie ne reste pas en marge : Fresnel, A. Normand, A. de Caumont, Flaubert, Maupassant, Barbey d'Aurevilly, C. Delavigne, J.-F. Millet, E. Boudin et le jerriais J. Millais participent à sa renommée intellectuelle et artistique.
4.3 Décadence économique
La vie économique de la Normandie sous la IIIe république s'endort dans une quiétude inquiétante qu'encourage le quasi protectionnisme de fait qu'offrent les débouchés de la capitale. La saignée de 1914-18 rend la situation plus préoccupante encore.
4.4 Après la seconde guerre mondiale.
La Normandie n'a pas connu de guerre sur son territoire depuis 1450, après les combats de chars dans la Plaine de Caen et de Falaise, la guerre des haies dans le Bocage, les multiples bombardements sous une couverture aérienne écrasante, c'est un pays de ruines et de cendres qui s'offre à la reconstruction. Toutes les villes, à l'exception de Bayeux, Alençon et Bernay ont péri sous les bombes. En six mois les combats ont fait autant de victimes que les forces de l'axe en ont causées à l'Angleterre pendant la durée du conflit.


5. NORMANDIE CONTEMPORAINE
5.1 À l'image d'une haute-Mormandie riche, à l'industrie puissante, s'oppose celle d'une basse-Normandie agricole et pauvre, si l'on excepte la Plaine de Caen. En fait, l'économie de la Normandie repose sur trois moteurs : l'élevage, le dynamisme des capitales régionales et l'influence des décentralisations parisiennes.
5.2 Conditions naturelles et populations.
Bénéficiant d'un climat océanique, doux et pluvieux, avec une prédominance de vents d'Ouest, la Normandie est réputée pour son temps extrêmement variable.
Peu peuplée, rurale, soumise à l'exode des campagnes, la Basse-Seine et la Plaine de Caen sont les deux lieux de concentration pour les industries et les services.
5.3 Les pays d'herbe.
Le Cotentin, le Bessin, les Pays d'Auge et de Bray sont des pôles herbagers spécialisés dans les produite laitiers et les Haras. Peu d'industries à part textile à Flers et nucléaire à Cherbourg.
5.4 La Plaine de Caen.
Pays de grande culture où l'élevage joue un rôle complémentaire. Caen est une vieille ville-marché, centre universitaire et administratif, agglomération industrielle - métallurgie, mécanique, chimie, électronique -.
5.5 Les pays de haute Normandie.
Vexin, Plaine de Saint André sont des pays de grande culture alors que le Pays de Caux et le Nord de l'Eure associent herbages et cultures en parcelles massives. Les fonds de vallées sont affectés aux cultures maraîchères ou fruitières.
La Basse-Seine constitue une des portes de l'Europe et assure le tiers du raffinage français. Si Rouen voit son trafic limité par la profondeur de son chenal l'ensemble avec Le Hâvre s'équilibre entre industrie - chantiers et réparations navals, métallurgie, papetière, automobile, électrique et mécanique - et services dans un rapport de 111 emplois tertiaires pour 100 de production.
5.6 Normandie autonome ou parisienne ?
A l'attraction parisienne - tourisme, décentralisation, migration quotidienne des confins vers Paris - la Normandie ne peut opposer qu'une volonté politique pour assurer sa persistance.