On trouvera ici, pour l'heure, les textes de Runes-Lettres d'O.D.I.N.
qui, à terme, seront complètés des réflexions du groupe de
travail de l'O.D.I.N.-76, de sa création jusqu'à sa dissolution en 1996.



lundi

Runes, hors série n°3 1992


Éditorial

Lettre à un cousin de Bretagne


« Certes l'identité des peuples occidentaux est atteinte, spirituellement et physiquement, mais le ressort n'est pas cassé puisque les peuples d'Europe se réveillent, s'ébrouent et brisent leurs chaînes », disait l'orateur.

Matérialisme scientifique ou libéralisme avancé (entendez : «matérialisme marchand ») les deux se rejoignent et se complètent. Leur idée conductrice commune est de réduire l'âme des peuples, leur culture et leurs traditions. L'œuvre aurait pu réussir, mais le plus immédiatement insupportable de ces deux totalitarismes, celui sur lequel pointe toujours, figé dans l'airain, l'index accusateur des bonnes consciences qui se sont tues durant tant d'années, provoque la répulsion à laquelle nous assistons aujourd'hui. Si les peuples de l'Est ont rompu le charme maléfique qui les envoûtait depuis soixante-dix ans, il ne faudrait pas conclure que le « modèle » occidental doive constituer une référence absolue : le libéralisme est, lui aussi, sous son apparence anodine, une machine à tuer les peuples.

« Une Nation peut-elle mourir sur son propre sol ? » posait Joseph de Maistre. Les courbes de natalité des pays de la Communauté Européenne « Élargie » sont une partie de la réponse. Les Européens de l'Ouest, avant même d'exister en tant qu'entité politique, ne s'aiment déjà plus, annoncent leur morbide volonté de plus être.

Ils n'ont plus de goût pour leurs cultures, leurs traditions : leurs avenirs leurs sont obscurs et incertains, ils refusent de se transmettre.

« Nos peuples, abrutis par les commissaires politiques et les amuseurs télévisés, sont voués à la lâcheté et à la bêtise, au reniement et à la trahison.
« Partout on apprend aux gens de notre monde à avoir honte d'eux-mêmes, on répand la mauvaise conscience, on prêche l'abandon de nos valeurs et de nos traditions. »
(Jean Mabire 06/1964)

Comment oser soutenir, à partir de ce constat d'auto destruction planifiée, que, pour quelque système de valeurs morales auquel on tienne, l'Autre pourra être aimé ?
O.D.I.N.-76

Y-a-t'il une identité française ?

Tout au long de l'Histoire, il apparait toujours deux France, face à face, qui se haïssent au point de s'entre-tuer. Rien de tel dans les autres pays européens : ils ont tous connu des conflits internes, mais pas ce perpétuel antagonisme.
Le spectacle de la France, par ailleurs, proclame la même absence d'unité, qu'il s'agisse des appartenances historiques de la moitié de ses provinces, des orientations géographiques de ses diverses parties, des cultures populaires qu'on y rencontre ...
Par contre, le système et les institutions politiques que Paris a imposé aux peuples que réunit l'hexagone depuis les débuts de la monarchie, loin d'exprimer sa diversité fondamentale, sont les plus unifiés du monde et, même quand il est question de décentralisation, les représentants de la Nation française ont fait un tabou de son « Une-et-Indivisibilité » !

La première illusion à dissiper est que la France, traduite en hexagone, est un ensemble géographique voulu par la nature. Pour se persuader du contraire, il n'est que de contempler sa carte physique placée à l'envers : le fameux hexagone saute-t-il aux yeux ?
Cinq formules politiques se dessinent spontanément :

carte 1 : La France à l'envers.

1 Bassin de la Seine.
2 Bassin de la Garonne.
3 Massif Armoricain.
4 Bassin du Rhône.
5 Bassin Rhin-Meuse-Escaut.

Logiquement, nous aurions du assister à la formation historique d'une fédération de l'isthme européen. Les hommes en ont disposé autrement.
L'esprit de domination a prévalu sur celui de coopération.
L'isthme européen n'a pas que la particularité d'être très compartimenté, il a encore celle d'être dissocié entre trois orientations maritimes et trois orientations continentales différentes. II est donc à la fois un point de rencontre et un point de dispersion, et non pas ce que le mythe prétend qu'il est : un creuset.
Sous d'autres rapports, on chercherait en vain une unité géographique quelconque à l'hexagone. Il semble que la France ne soit devenue une personne, dans l'esprit public, qu'après la mort de Louis XVI, qui la personnifiait en la sacralisant. II était impossible de demander au peuple de renoncer à sa Foi dans la Patrie-Personne.

Les aires linguistiques, fixées au XIème, siècle, ont peu varié pour l'essentiel jusqu'à l'époque actuelle, qui, pour la première fois, met en péril les langues populaires. Sept langues se partageaient alors le territoire de l’hexagone :

carte 2 : Les Langues au Xème siècle.

1 le Français d'Oïl.
2 L'Occitan.
3 L'Italo-Occitan.
4 Le Franco-Provençal.
5 Le Basque.
6 Le Catalan.
7 Le Norrois.
8 Le Celtique.
4 Les Bas et Haut-Allemand.
10 Les dialectes Italiques.
11 Le Castillan.

Il faut reléguer aux archives le mythe de l'hexagone et rendre la parole à la diversité de la Flandre à la Guyenne, de la Corse à la Normandie, de la Franche-Comté au Pays Basque, de la Bourgogne au Languedoc, de l'Alsace à la Bretagne, de la Savoie aux Pays Toulousains.

Alors que le pouvoir, en 1981, a dit vouloir accepter une véritable régionalisation, il est temps que celui-ci l'accompagne d'un réveil des identités qui viendra redonner vigueur à notre vieil ensemble français.
d'après Olier MORDREL
(Le Mythe de l'hexagone)

Qu’est- ce que l'identité Française ?

L'identité d'un peuple, d'une Nation ne peuvent être définis sans qu'il soit tenu compte des données ethniques et historiques.

Souvent ethnisme et tradition se sont opposés au travers de deux écoles : l'Allemande et la Française.
D'un côté, Fichte affirme le caractère mono-ethnique de son pays : « l'Allemagne n'est pas une création de l'histoire mais une race primitive qui a le droit de se proclamer, purement et simplement, ‘le’ peuple (ALL MAN) ».
De l'autre côté, Renan rejette la « théorie des deux races » exposée par le Duc de Saint Simon, Boulainvilliers et Michelet. En effet cette théorie aurait dressé, l'un contre l'autre, le peuple supposé d'origine gallo-romaine et la noblesse théoriquement de sang germanique. Aussi Renan préféra poser le principe de la diversité ethnique de la Nation française qui devint « la possession en commun d'un riche legs de souvenirs » auxquels on prête « la volonté de faire valoir l'héritage que l'on a reçu indivis ».

La prétention française à l'universel est une idée, aussi constante que couramment admise par tous les milieux intellectuels et politiques, d'Antoine de Rivarol à Jules Ferry, pour ne citer qu'eux. Cette prétention, héritage vieux de trois siècles, nous fait claironner sur tous les tons et à tous les modes que « Tout homme a deux patries : la sienne et puis la France ». Comment s'étonner ensuite, qu'une « identité nationale » ainsi définie ne conduise pas à la justification, abusive jusqu'à l'absurde, du « jus soli ». Le « droit du sol », soit, mais à l'époque où il a été défini par le législateur quels étaient les circonstances, la nature, l'ampleur et la qualité des flux migratoires ? S'agissait-il de migrants internes aux limites de l'Empire français ? De migrants artistes ou intellectuels, pour lesquels s'instaura, quoiqu'on puisse en penser, le droit d'asile « politique » ? D'artisans qui, sur les mêmes bases identitaires, chrétiennes et philosophiquement compatibles, apportaient quelque chose de plus à l'édifice commun avant de se fondre dans une partie de l'ensemble ?
Ou étaient-ce de simples réfugiés économiques, attirés par la manne que dispense un système social dévoyé, qui en six mois redresse les courbes statistiques démographiques des « nationaux », dont l'utilité véritable ne se retrouve que dans l'apaisement qu'ils apportent aux princes ethnocidaires qui souhaitent prolonger l'existence de leurs gouvernements ?
Nous voyons aujourd'hui, alors que les frontières entre les États d'Europe viennent d'être supprimées, que la confusion perdure. Si nous sommes français, ou allemands … c'est parce que nous le sommes de Normandie, de Bavière ... La volonté suicidaire qui abaisse les frontières intra européennes ne fait que prolonger celle qui hier ne voulait plus voir « cracher par terre et parler breton »au nom de la prétendue « unité du peuple français ».

« L'histoire de son pays est nécessaire pour tout homme éclairé qui ne veut pas vivre comme un étranger dans sa patrie » posait le Chancelier d'Auguesseau.
Si, pour certains, la France « patrie des Droits de l'Homme » est née en 1789, d'autres, non moins dangereux pour nos existences régionales, voudraient conforter l'unicité et l'indivisibilité de son histoire, du mésolithique à nos jours, comme si les dieux anciens avaient devancé la volonté divine des chrétiens en faisant de notre « pré carré » la citadelle d'un destin messianique.
Nous subissons, ici encore, un assaut de l'intelligentsia centralisatrice. L'Église et la Monarchie capétienne, pour assurer leur stabilité politique vis à vis des grands féodaux, se sont cherché des racines auprès de Charlemagne, de Clovis et de l'Empire Romain. Après la défaite de 1870, la république fera du vaincu d'Alésia le premier héros national de notre histoire.
Monnaie gauloise à l'effigie de Vercingétorix

Cette vision romantico-cocardière conduira à l'auto-génocide européen de 1914-1918, Droits de l'Homme oubliés le temps de sauver la Patrie. Mais les millions de morts de toutes ces vaillantes armées ne doivent pas nous faire oublier que Charlemagne « Empereur à la Barbe Fleurie » était un germanique dont le Palais d'Aix la Chapelle est aujourd'hui à Aachen, que Clovis était un Franc donc un Belge, et que, pour en finir, l'Empire Romain, si il a laissé des scories fertiles et civilisatrices, n'en demeure pas moins un phénomène totalement allogène au Nord de la Loire. Accepter que l'on fixe les bases d'une France mythique sur de telles allégations, relève d'une l'élucubration du même ordre que prétendre que, consécutivement à l'occupation « Anglaise » des Plantagenets, Bordeaux est une ville Scandinave !

Lorsque Bernard-Henri Lévy fustige « les communautés de faits d'abord. C'est à dire de ‘race’, de ‘terre’, de ‘terroir’, de ‘région’, de ‘nation’, que sais-je encore, toutes les communautés incarnées (…) dont l'horizon me parait toujours être l'enfermement, la violence et finalement la barbarie » pour magnifier « les autres, les communautés de verbe, de loi, de papier, d'idéal. Des communautés sans ancrage, des rassemblements sans frontières, des identités cosmopolites et toujours transgressives » ; il fait plus que prolonger les vieilles racines du démon jacobin, il apporte surtout la terrible preuve de sa méconnaissance des réalités qui tissent le vieux fond « français » comme celle de son mépris pour ceux qu'il prétend « aimer ». Comment Bernard-Henri Lévy peut-il nier, ou tenter de faire admettre, que les nations, régions, terroirs ou terres habités par des individus, possèdent autant de marques de civilisation transmises par la parole comme par l'enracinement alors que le souvenir quasi mystique d'un terroir propre peut rester vivace jusqu'à justifier une ardente réappropriation qu'aucune sanction ne doit réfréner ? Comment nier que les sociétés, quelques soient leurs lois, subissent les idéaux de leur temps ? Que les Empires, s'ils ont permis des rassemblements par-delà les limites étatiques ou ethniques, n'ont jamais interdit aux citoyens de vivre et de prospérer au rythme de leurs traditions ancestrales ? Comment peut-on oser espérer faire admettre que dans la permanence du chaos, donc de la violence, de la barbarie, qui sont d'authentiques enfermements, l'on puisse maintenir des communautés sans racine, toujours transgressives, puisque qu'elles s'opposeraient aux lois et à la survie des communautés ? Bernard-Henri Lévy confirme par ses propos sa filiation troublante avec ceux qui niaient, hier encore, les particularismes mais se servaient de leurs références (clochers, campagnes, épouses, mères) pour conduire les nations européennes à l'hécatombe ! Il montre, à suffisance, que toutes les façons d'être ennemi des identités françaises, si elles poursuivent des buts différents, se valent et se rejoignent dans leurs méthodes.
Que l'on défende une France pluriethnique et/ou multiculturelle, dans ces conditions exo-centrées, n'est qu'en apparente opposition avec ceux qui s'adonnent à une vision exclusivement autocentrée sur Paris. Leur querelle n'est qu'une dispute sur une question de niveau : les uns tiennent pour l'intégration sur un modèle américanisé, les autres pour un melting-pot ou la carmagnole feraient la farandole avec les rois de France autour de Notre Dame de Paris ou dans les jardins de Versailles. L'un comme l'autre relève du même appauvrissement cérébral. Ne pas savoir s'accepter Breton, Normand ou Picard, c'est ne pas savoir s'aimer Français. Prétendre que vouloir maintenir nos réalités millénaires enracinées dans nos terroirs est une position d'enfermement, plus que vouloir nous rendre étrangers les uns aux autres, nous rend avant tout étrangers à nous même. C'est une confusion regrettable, mortelle pour nos communautés de destin, qui interdit tout avenir européen.

Les exemples de relecture de l'histoire donnent plus souvent lieu à réflexion que de sujets à digressions. Si la France fait partie de l'Europe, c'est parce que, au-delà de sa diversité interne, elle est très majoritairement indo-européenne de peuplement. Dans ce cas il nous faut admettre que notre vision contemporaine de la France, germanique au Nord, latine au Sud, celtique dans son ensemble, est anachronique si l'on accepte de ne la considérer que sous le seul concept de nation développé depuis 1789 dont on ne peut regretter les conséquences tout en défendant les principes.
La France procède de la race indo-européenne, mais ce peuplement s'est échelonné sur une période allant de – 4.000 à – 3.400. Cette longue période a permis aux hommes de s'intégrer aux paysages qu'ils ont façonné, aux autres peuples qui occupaient antérieurement notre espace européen, avec plus ou moins de bonheur pour les premiers occupants, et de recréer des îlots de particularismes. Ce sont ces espaces et ces hommes qui ont créé les regroupements tribaux, ces nations qui s'appliquent à prouver une filiation des individus avec un héritage moral et spirituel plus que matériel, à leur sang, à leurs œuvres et qui perdureront au moyen-âge avec, par exemple, la Nation Normande au quartier latin de Paris. Les patries, terre des pères, existent, complémentairement aux nations, et sont l'héritage matériel d'un patrimoine fruit du travail ou du génie créateur.
Cet essai de définition de nation et patrie posé, nous tiendrons pour admise la notion de Nation aux peuples européens avant l'invasion romaine ou aucune trace d'un quelconque destin commun propre à l'hexagone n'a pu être révélée. La défaite d'Alésia montre, au contraire, que la Gaule n'était pas la France telle que nous la concevons, mais une fédération informelle de peuples celtes dont le modèle se retrouvait de l'Irlande au Piémont et de l'Ibérie à la Belgique. L'action « civilisatrice » de Rome, puis la pénétration du christianisme, respecteront ces espaces dénommés pagi pour la circonstance. En 280, l'empereur Dioclétien jettera les bases d'une nouvelle entité administrative, la Seconde Lyonnaise. Où les pagi deviendront diocèses d'Église. Donc, virtuellement, la Normandie existe dès le IIIème siècle, la France pas encore. Cette dernière ne deviendra potentielle qu'avec l'arrivée de « barbares » ayant à leur tête Clovis, chrétien jugé « païen » car épousant les dogmes d'un prêtre hérétique d'Alexandrie (Arius). Mais l'arrivée des francs n'est pas pour autant la création d'une entité France. Les domaines sont mouvants pour cause de partages lors des successions, et il existera simultanément plusieurs Francie, mais toujours une seule Seconde Lyonnaise. Charlemagne fut un empereur d'Occident préoccupé de la « défense » de ses marches, même maritimes, mais en Neustrie existait une colonie saxonne dans le Bessin et en 987 le royaume capétien tenait plus d'une succession de fiefs, parfois reliés entre eux, et d'une clientèle mouvante, que d'une véritable entité territoriale. Il faudra attendre la fin de la Guerre de Cents ans pour que l'on parle enfin de royaume de France. Et l'idée d'uniformité fit lentement son chemin dans l'oubli d'une pucelle bourguignonne qui devait devenir, très tardivement, un des symboles de l'unité française. Reconnaissance de circonstance, Jeanne d'Arc ne sera canonisée que six siècles après son supplice, au même titre que Vercingétorix sera le saint de la France laïque et revancharde d'après 1870 … Mais d'unité française point encore, puisque les féodaux, au siècle de Louis XIV, menaient la Fronde pour préserver leurs privilèges (entendez particularismes).

Donc, de – 4.000 au XVIIème siècle pas de France-Une-etc., pas de pré carré, fût-il capétien, cette notion sera créée par Louvois pour justifier la politique rhénane du Roi Soleil. Pas de France comme nous la concevons, appauvrie, triste, uniforme, américanisée, mais des Nations reconnues jusqu'au 4 août 1789. De ces Nations qui participaient à enrichir cet esprit qui partout nous caractérisait, sans jamais nous renier, aux yeux de nos voisins. Ne serions-nous devenus français que par rapport au reste de l'Europe ? Vouloir, à partir de cela, faire de la France une personne bien réelle, par ses monarques, puis une divinité laïque relève du fantasme. Que l'originalité des cultures fédérées sous l'appellation générique de « culture française » ait ébloui, avant de leur servir de modèle, toutes les cours d'Europe n'empêchera jamais de nous souvenir que ces richesses trouvaient leurs racines dans nos provinces, héritières de patrimoines particuliers érigés sur un vieux fond commun d'habitudes bordurières.
François Delaunay

Les régions de France désagrégées

Jamais les nations françaises n'auront été autant menacées dans leurs identités. Passage de l'État centralisateur à l'État providence, désagrégation orchestrée des liens communautaires hérités de nos traditions respectives, mondialisation de la production des biens et uniformisation des standards de consommation, constitution de ghettos échappant à la souveraineté de l'État sans que les collectivités locales ou territoriales puissent contrôler effectivement le développement et l'occupation de leurs territoires. Tout concourt à la désintégration des nations qui fondaient, hier encore, la puissance de la France.
Après que l'Allemagne ait recouvré son intégrité territoriale, que les pays de l'Est abandonnent le joug d'une tyrannie idéologique sans précèdent avec ce que l'histoire nous enseigne, le cadre institutionnel français perd son contenu : les identités françaises disparaissent sous les coups redoublés des médias vecteurs d'un universalisme de pacotille et des corps sociaux initialement chargés de transmettre nos cultures.
Les schémas familiaux, éducatifs, sociaux, qui assuraient il y a trente ans encore, la pérennité d'un système de valeurs qui, s'il ne répondait pas immédiatement à nos convictions, défendait une théorie de l'homme, se sont effondrés victimes d'une implosion liée à la mise en place d'un nouveau modèle « libéral » où règne en mal absolu le seul primat économique. Nouveau Janus, l'homo-économicus, est ravalé au double rôle de consommateur-producteur, chaque partie décérébrée de l'autre. Aujourd'hui les mutations professionnelles séparent les familles, déportent les individus hors de leurs cadres naturels, les responsables scolaires, quand ils ne dénigrent pas les régions et les traditions locales – symboles d'archaïsme – prônent l'équivalence des modes de vie. Les provinces de France subissent la loi des technocrates dé-civilisateurs pour, dès que les conséquences de leurs actions destructrices leur ont fait perdre leur masse critique, économique et démographique, se fondre dans la grisaille des banlieues mondialisées ; l'économique dénie tout droit d'existence aux collectivités qui ne sont pas reconnues « potentialisables » en organisant la fuite des sièges sociaux à la faveur de regroupements capitalistiques internationaux.
Ainsi vidées de leur substance, de leur capacité d'action, sinon de réaction, les nations authentiques, enracinées, qui constituent encore des communautés de destin, sont conduites à subir toujours plus les contraintes imposées de l'extérieur. La plus visible, et non moins dangereuse, réside dans l'afflux de populations dont la qualité, autant que le nombre, laisse augurer de l'avenir des provinces. Leur affaiblissement préalable par une volonté nivelatrice n'est qu'un premier pas vers leur dilution dans un cosmopolitisme dont nous pouvons goûter toute l'amertume lorsque les effets du discours s'estompent pour tenir leurs tristes promesses.
À la lumière de la « vie » dans les quartiers de la « Big Apple » (N-Y : prononcez Enn'ouaïe pour faire plus vrai) nous pouvons déjà apprécier quelles seront nos conditions de vie lorsque se seront apaisées les dernières nuits chaudes des quartiers socialement défavorisés. La juxtaposition d'ethnies différentes, sans système de références communes, sur un même territoire, conjuguée des effets de la crise sociale actuelle, conduisent à un déclin qu'un ministre de l'intérieur Belge comparait avec la chute de l'Empire Romain sous les assauts de la Barbarie. Belle perspective d'avenir à l'heure des accords de Maastricht ou de la signature de l'Acte Unique Européen !
Bien que défendant le droit à la différence, il convient de souligner que nous entendons rester particuliers au sein d'un même ensemble social et culturel. Les migrations de populations ont toujours entraîné, instinct grégaire, le regroupement d'originaires, la recréation de micro sociétés, régionales, nationales ou ethniques. Aujourd'hui, dans les grandes agglomérations, mais à terme, encouragées par les décideurs soucieux de résoudre leurs problèmes immédiats en refusant de prendre leurs responsabilités morales, ces regroupements seront incités à occuper d'autres espaces plus disponibles, de la périphérie de Paris aux villes nouvelles, nouveaux échecs d'urbanisme, puis dans les cantons désertifiés. Si c'est une façon statistique de résoudre le problème rural, il serait vain d'oser croire que cette forme de repeuplement ne s'accompagnera pas un jour d'une revendication territoriale de type tribal qu'accompagnera une révolte des « paupers » des « limes » contre les « riches » de l'« urbs » et dont l'exemple yougoslave pourrait-être la dernière répétition avant la générale.
II est paradoxal que dans notre société seuls les indiens d'Amérique, les Juifs, les Palestiniens et, depuis peu, les populations des anciens pays du bloc de l'Est, aient le droit de manifester, avec notre sympathie émue, leur volonté d'avoir pour développer leur identité un territoire reconnu, alors qu'ailleurs on impose aux populations des changements radicaux dans leur composition. Nous ne voulons pas que l'on détruise ce qui composait hier notre particularité. Nous ne voulons pas devenir les « Mickeys » d'un Disneyworld où l'insécurité permanente des personnes accompagnerait la disparition de leurs modes de vie ancestraux. Nos traditions « régionales » sont toutes aussi dignes d'intérêt que celles de ces déracinés que l'on exhibe tout autour du monde pour de pseudo motifs humanitaires. Nous ne voulons pas que le travail de nos pères, leurs modes de vie, soient remplacés par une culture au rabais que l'on irait glaner dans les gondoles des super marchés, nouveaux luna-parks. Nous ne voulons pas d'une société où la certitude de ne pas mourir de vieillesse s'échange contre l'assurance de notre disparition en tant que peuple.
À l'heure où tant de grandes âmes et de belles consciences s'émeuvent de ce que certains chefs d'État aient pu organiser de façon systématique la déportation de populations entières hors de leurs territoires naturels, pouf les remplacer par des colons disciplinés (cf. les Baltes, Roumains, Cambodgiens, ...) on est en droit de se demander si, à l'abri du paravent libéral, les mêmes idéologues ne continueraient pas la même sinistre besogne pour d'autres causes toutes aussi inavouables. Devant l'incapacité de l'État, les collectivités territoriales devront-elles assumer, devant leurs résidents, la responsabilité de situations dont elles ne sont pas les initiatrices et pour lesquelles aucun pouvoir ne leur semble devoir être conféré, sinon celui d'enregistrer les conséquences da la « soft idéologie » ?
L'identité de notre province se nourrit des souvenirs et des références qu'elle partage avec la France, dans la continuité des générations qui ont fait notre commune grandeur. Cette continuité est interrompue, et tout porte à croire que cette interruption est une fatalité. Si la culture est la nature de l'homme, les transformations des populations régionales induiront d'importantes modifications psychiques et culturelles, rendront aléatoires la transmission d'un patrimoine devenu sans signification.
Notre but particulier étant de pouvoir mieux participer à l'ensemble culturel français et européen, il est primordial que nous garantissions la pérennité dynamique de notre particularisme. Nous ne pouvons admettre que l'on change, pour quelque type de satisfaction idéologique ou marchande, les composantes essentielles de notre nation Normande.
Jean Halot

Préserver l'identité Française


La France et ses provinces sont trahies par l'idéologue et le politicien. Moralement touchées par un dénigrement systématique de leur passé elles doivent rapidement mettre un terme à l'auto-culpabilisation que l'on leur a instillé, en valorisant leurs identités et leurs histoires propres. Ici sont les véritables racines de la manifestation du « génie français ».

Comment défendre et promouvoir l'identité Normande aujourd'hui ?

Poser cette question appelle une réponse qui pourrait ne pas avoir de fin tant l'étendue du sujet est vaste, mais nous pouvons de façon lapidaire annoncer que l'identité ne décrète pas, elle s'affirme.

Tout semble fait pour étouffer notre identité. Qu'il s'agisse des hommes, de la mémoire, du territoire ou des paysages, de la culture, du patrimoine vécu, il est urgent de mettre un terme au processus d'aliénation et d'altération que subit notre pays.

Qui est Normand ? Qui peut le devenir ?
Celui qui hérite de cette chance et ne la défend pas ?
Celui qui vient y vivre et dénigre la Normandie ?

Comment peut-il être encore question de liens du sang, ou même de patriotisme Normand, tant les volontés se sont acharnées à réduire cet espace mental et géographique qui faisait écrire à R. Allen Brown « ... the Normans were not merely the Romans of their world, but also the Greeks »(1). Car à l'instar des modèles auxquels on les compare ici, on peut leur appliquer aussi la formule : « La Normandie n'est plus en Normandie, elle est partout où sont passé ses fils » (2).

« Car une nation c'est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une constituent cette âme, ce principe spirituel. L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs ; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage que l'on a reçu indivis (...) Le chant spartiate : « Nous sommes ce que vous fûtes, nous serons ce que vous êtes » est dans sa simplicité l'hymne abrégé de toute patrie. (…) Une Nation est donc une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu'on a fait et de ceux que l'on est disposé à faire encore. Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir clairement exprimé de continuer (3) la vie commune. L'existence d'une Nation est (...) un plébiscite de tous les jours, comme l'existence d'un individu est une affirmation perpétuelle de vie». Cette longue citation d'Ernest Renan résume tout notre sentiment enraciné et s'y applique avec une telle véracité qu'elle renforce notre conviction identitaire Normande.

Comme d'autres Nations, l'identité de la Normandie s'affirme au travers de la gloire de ses constructions, invention de l'architecture religieuse et militaire, mais à l'ombre des dentelles de pierre le génie intellectuel s'en est montré digne dans tous les domaines, beaux-arts, organisation sociale, mathématiques, pures ou appliquées : Corneille, Boieldieu, Sorel, Le Verrier, Fresnel, ne sont pas des connus du seul panthéon Normand, non plus des gloires de seconde zone, pour ceux qui savent les intégrer parmi les gloires « françaises », au-delà des platitudes égalitaristes ou tiers-mondistes.

Les budgets de l'enseignement dépendent de plus en plus des prébendes des collectivités territoriales, c'est à ces dernières d'exiger qu'à la pseudo culture « de masse » soit substitué l'enseignement de notre patrimoine sous ses aspects Normands les plus multiples. De même que les présidents de régions, au lieu de gausser sur le mauvais emploi des fonds des F.R.A.C. (4) seraient bien inspirés de contrôler la qualité des dépenses dont ils demeurent les principaux responsables. II n'est pas tout d'affirmer que Géricault par ci, Boudin par là ... Les Normands attendent que l'on encourage leur culture dans toutes les manifestations de son génie, mais ils attendent surtout que cette culture leur renvoie, sinon l'image qu'ils ont d'eux-mêmes, au moins un message dont la qualité abandonne enfin le canular mondain.

Les grands commis, l'in-intelligentsia, s'abandonnent avec délices aux modes étrangères, exotiques, à toutes les pantalonnades. Depuis 1981 on a reconnu aux régions un rôle de collectivité intermédiaire, on est en droit de penser que le législateur avait voulu instaurer un contre-pouvoir dont elles n'ont pas saisi l'étendue des possibilités.

Face aux élites acculturées, décadentes, c'est aux régions, héritières d'histoires et de passés souvent prestigieux, d'assurer la défense intellectuelle et morale de leurs populations, donc des Nations dont elles ont la charge.
O.D.I.N.-76

1 Les Normands ne furent pas purement et simplement les romains de leur monde, mais aussi les grecs.
2 Paul René Roussel (Y-I.M.).
3 (n.d.l.r.) c'est nous qui soulignons !
4 Fonds Régionaux d'Aide à la Création.

Tribune

Plutôt que d’accorder, ou d’attendre, un éventuel « droit de réponse » à « l’orateur » de l’éditorial, nous avions préféré prendre les devants en demandant à un membre éminent du F.N.J. d’exposer la position du parti national de référence quand à la présente livraison.


Tribune

Souvenir d'une victoire future, notre combat, simple maillon de cette chaîne d'acier et de vie qui unit passé et avenir à l'instant présent, s'inscrit dans la continuité de notre héritage.
Nos paroles et nos actes sont les nôtres autant qu'ils furent ceux de nos pères et qu'ils seront ceux de nos enfants : à la fois proches dans leurs différences et si différents dans leur constance. Protéger le passé pour répondre de l'avenir, cette espérance est en nous qui en sommes porteurs parce que l'histoire nous l'a confiée. C'est l'éclat d'un acier pur que la poussière du temps ne ternit pas.
L'histoire ne retiendra de nous que ce que nous lui donnons : la victoire de notre Peuple ou l'échec de notre génération. II n'appartient qu'à nous de transmettre à nos générations futures notre volonté de peuple libre, de refuser de plier genoux devant l'esclavage et l'asservissement.
Investissons-nous dans la reconstruction de la forteresse mémoire. Elle est gardienne de notre identité. Investissez-vous totalement, sans jamais en espérer un quelconque bénéfice personnel, si ce n'est le sentiment du devoir accompli. Et alors nous aurons tout. Si certains rient de notre passion enthousiaste, rappelons-leur qu'au Liban, en Lettonie, en Croatie, en Irlande … les victimes de leur ironie payent, les armes à la main, de n'avoir pas su défendre politiquement leurs droits !
Aussi discutons entre gens sérieux de ce que nous voulons !
Indépendance ou Autonomie
Certes, on peut rêver d'une nouvelle Nation Normande dont les armées conquérantes retourneraient porter la bonne parole … aux américains en suivant Leif Erikson. Dommage, parce que cela n'est pas dans l'intérêt de la Normandie. Nous ne pouvons pas effacer huit siècles de notre histoire au seul motif que nous les avons passés sous la coupe de plus en plus pesante des français. D'autant qu'il est plus facile de tirer parti de la France que de la combattre...
Aussi intéressons-nous à cette notion, si galvaudée, d'Autonomie. Autonomie d'une Nation Normande avant tout unie. La réunification sans unité est une image creuse dans laquelle les localismes des cités ou des départements peuvent encore trouver leur place. Si la réunification est une nécessité politique, historique, culturelle ou économique, l'unité seule permet l'épanouissement de notre identité et le développement de l'enracinement.
De plus, que ce soit dans l'Europe technocratique des douze ou dans une Europe future des Nations, seules les entités régionales sont et seront prises en considération. Si Bruxelles n'a que faire de deux régions Normandes qui économiquement n'existent pas, l'Europe aux Cent Drapeaux n'aura, elle, que faire de régions qui n'existent pas historiquement.
L'unification donne à la Normandie sa véritable dimension historique, politique, économique et sociale : celle d'un État.
Dès lors, nous pourrons prendre nos destinées en mains au sein d'une France consciente de la force politique de ses régions.
Forte de par le mode d'élection de ses membres au scrutin proportionnel intégral par « pays normands » rééquilibrés, le Conseil régional de Normandie pourra récupérer certaines compétences de l'État, mais aussi les ressources correspondantes et hériter des prérogatives des Conseils Généraux.
La Normandie a les moyens économiques et naturels de ces ambitions. Ces moyens sont actuellement saccagés par des instances au service de l'Île de France et de l'État. Rendre la Normandie Autonome, c'est lui permettre de prendre en mains les forces de sa destinée.
Les richesses naturelles de la Normandie sont pillées pour la construction de l'Île de France, oui sacrifiées à Bruxelles au nom de la Politique Agricole Commune.
L'aménagement du territoire est une soumission totale aux intérêts de l'Île de France et de l'État ... L'intérêt public en Normandie, c'est l'intérêt des Normands !
Les efforts extraordinaires faits en faveur de l'enseignement supérieur, au lieu de favoriser, sinon leur implantation, du moins le maintient des sièges sociaux des grandes entreprises, encourage l'exode de l'élite intellectuelle de la jeunesse normande. L'éducation, la formation, l'environnement, l'aménagement du territoire doivent être décidé dans le seul intérêt de la Normandie.
L'Arc Atlantique est une nécessité pour toutes les régions de la façade Atlantique de l'Europe face aux axes lotharingien et méditerranéen. La Normandie doit être libre de nouer des relations diplomatiques pour se protéger et progresser au sein de l'Europe. La Normandie doit pouvoir assurer la défense de ses frontières maritimes et séquanienne. Seules des unités combattantes connaissant parfaitement le terrain sont en mesure d'effectuer efficacement cette mission de défense nationale. La Normandie doit disposer d'une telle unité armée.
Puisque la France nous est néfaste actuellement, prenons notre destinée avec une certaine autonomie. Le jour où les liens historiques passés ne seront plus assez forts pour nous retenir, nous nous souviendrons de la grandeur de notre héritage historique, de notre culture.
Nous aurons remis notre drakkar à flot.
Frank Le Dun

Normandie, France, Europe

« Je ne me flatte pas de vous faire comprendre la France. J’ignore si le la comprends moi-même. »
Georges Bernanos

Unité historique non respectée, particularismes niés, richesses naturelles spoliées, administration au service exclusif de ses ambitions, la Normandie est une Nation sans liberté.

Nation ! Voilà le mot essentiel. Celui que l'on n'ose dire. Celui qui fait peur. Pourtant la France a toujours soutenu les nationalismes ... hors de l'hexagone. Nationalistes au dehors, jacobins au-dedans, nos dirigeants ne comprennent pas que la raison des Nations triomphe tôt au tard de la raison des États. Ces États que nous qualifions de jacobins, du nom de ceux qui avaient inventé le parti unique, la doctrine d'État, la dictature issue de la poussée plébiscitaire ou de l'émeute.

Le vingtième siècle s'achève sur un étonnant printemps des peuples. Des peuples de chair, de sang, de rêve et d'esprit. Ces peuples réclament leurs langues, leurs mémoires, leurs libertés collectives. Ils aspirent à la maîtrise de leur destin. Mais la paix ne pourra véritablement s'établir en Europe que par la détente, puis par l'entente, enfin par la coopération, pratiquées entre tous les peuples de notre continent. Quelques puissent être les blessures laissées par les conflits, les comportements hérités de l'histoire, les barrières dressées par les régimes, cette coopération, plus que souhaitable, est une nécessité vitale. L'Europe est seule entre deux masses : celle des tenants du Nouvel Ordre Mondial promulgué à l'issue des événements du Golfe et celle du Tiers-Monde qui évacue son problème démographique sous nos cieux. Entre les alternatives de dépendance ou d'occupation de notre espace quelles sont nos chances véritables de retrouver une dynamique qui nous garde autonomes ?

L'Europe des États est un continent de vieux où les égoïsmes de l'« Ouest » tentent de persuader les peuples qui se réveillent qu'ils sont trop jeunes pour des structures trop vieilles. Dans cette Europe sacrifiée aux démons de l'économisme toutes les institutions, tous les partis, toutes les sectes ont le Sida et communiquent leur pourriture à la main qui s'approche pour les rafistoler. La seule méthode qui sauvegarde le sang pur, qui perde le moins de temps et qui atteigne les âmes c'est de s'appuyer fermement sur la fécondité des Nations. Et nous refusons de conforter la confusion des États « Nations », seules les communautés de destin enracinées dans le terreau de l'histoire méritent d'être appelées Nations.

Si nous doutons de la fécondité des Nations dans le cadre étatique, l'Europe est par contre capable de monter cette nouvelle construction originale et imprévue qui ne pourra prendre d'autre nom que celui de civilisation. Mais il faut que les Nations se redécouvrent, se rencontrent, garantissent l'autonomie de toutes leurs sources particulières.

La sagesse des gouvernants commande de se méfier des Normands. Cela fait bien longtemps qu'étrangers sans l'être, tout en l'étant, nous affectionnons dans les lettres françaises le rôle séditieux et indispensable des Irlandais dans les lettres anglaises. Nous avons tous pris, sans complaisance et sans préjugé, la mesure de la France. Nous savons où est sa richesse pour y avoir largement contribué. Jamais l'empreinte de la France n'a été aussi puissante que lorsqu'elle a été un phare intellectuel. Le lien qui nous unit est la langue, et il unit au-delà des frontières géopolitiques. Nous voulons délier et articuler les forces créatrices de la France de la Francophonie, Empire de l'intelligence qui saura recréer pour l'Europe que nous désirons l'antique tradition des libertés françaises.

C'est par le développement de cet esprit francophone que nous pourrons lutter contre l'hégémonisme capitalo-américain et libérer l'Europe de la tentation jacobine.

Si nous parions sur cette renaissance européenne par les Nations, ce n'est pas pour nous confiner frileusement dans une technocratie à douze, mais bien pour promouvoir une Europe globale, ouverte aux nouvelles comme aux vieilles Nations.
Gilbert Crespin